
Journal de bord
CAP HORN
56° sud
67° ouest
Sur
Eliot, cotre de douze mètres.
22 / 01 / 2004 – 29 / 01 / 2004.
Ushuaia – Cap Horn – Ushuaia.
Propriétaires : Yves et Véronique.
Equipage : Gilbert , Evelyne et Christophe.
Jour
4. Dimanche 25 janvier 2004. Caletta Maxwell.
La dépression est arrivée avec quatre ou
cinq heures de retard Elle semble moins forte que prévu. Il
faut dire que nous sommes bien protégés. Le vent est
nord, en plein dans le nez si nous décidions de rentrer. Demain,
il devrait suivre la dépression et tourner à l’est.
Du portant pour aller vers Lennox ou Puerto Toro.
La matinée est déjà bien avancée quand
nous commençons l’ascension du mont le plus haut de
l’île Hermite. C’est lui qui nous protège.
Juste derrière le bateau. Nous avons manqué la météo
de huit heures. Mais ici, il ne peut rien nous arriver à part
rester bloqués une semaine… Les cales peuvent nous permettre
de tenir deux mois et la cuisine est bonne, alors. Au nord, c’est
blanc. La mer moutonne bien, mais ce n’est pas trop grave.
Pas le temps idéal ,en tous cas, pour aller se pointer, vent
de face, en pleine Bahia Nassau, là où les vagues atteignent
parfois dix mètres de haut. Marcher, surtout en montée,
n’est pas la spécialité de Gilbert, mais il est
séduit, comme nous tous, par la flore. Les arbres sont rabattus
par le vent, leur tronc de deux à trois mètres, solide,
au raz du sol. Il y des tas de mousses vertes bien rases, des forêts
de hêtres nains pas plus hauts que quelques centimètres,
des fleurs rouges carnivores grosse l’ongle, de solides marguerites
blanches, de l’herbe aux tiges à l’allure de jonc… Tout
un monde miniature superbe, adapté au vent, qui passionne
Yves. Certains endroits, coincés entre des rochers de granit
gris et des pierres blanches, ressemblent à des jardins japonais.
La montée est rude mais très agréable, nous
marchons sur un tapis de végétation de tous tons et
nuances de vert, dans lequel nos pieds s’enfoncent à cause
de la tourbe humide en dessous.
Plus nous montons, plus la vue est « panoramique » et
Eliot, plus petit, qui apparaît ou disparaît selon les
ondulations du terrain. Presque en haut, on voit les fjords de l’est
de l'île, les autres îles des Walloston au nord et le
Horn au sud. Tout en haut, le vent accélère. A fond.
Difficile de tenir debout. Le bruit du vent est très fort
aussi. La vue est belle. Avant de redescendre, nous prenons certainement
nos dernières photos du Horn. Bien calés. Au loin,
dans le gris, plein sud. Les dernières photos, du voyage.
Car nous reviendrons. C’est sûr.
Très bonne soupe aux artichauts. Merci Véro, restée
sur le bateau cuisiner et garder Eliot. Ensuite, sieste pour tout
le monde. La mer, ça fatigue. La « montagne » aussi.
C’est vraiment une très bonne idée d’être
venus au cap Horn sur un petit bateau, avec des skippers marins-alpinistes-marcheurs,
passionnés de pêche, de voyages et de cuisine. En fin
d’après-midi, nous partons, avec Yves, faire un petit
tour en annexe de l’autre côté de Maxwell, vers
l’île en face. Le trois chevaux suffit largement pour
faire ce quart de mile. Une lumière de Méditerranée.
Mis à part le kelp, la maman canard moyen rassurée
qui pédale avec ses petits derrière, le couple d’oies,
blanche (le mâle) et noire et blanche (femelle), les hêtres
qui poussent à plat au lieu des pins parasols, on se croirait à Minorque
au printemps. Le soleil, qui est passé sous les nuages, éclaire
les cormorans qui rentrent se coucher ou partent en mer pour un dernier
coup de pêche avant la nuit. Nous voyons leur œil cerclé de
rouge quand ils passent, rapides et costauds, au-dessus de nos têtes.
Le cormoran est une torpille, l’albatros un planeur. Posé sur
l’eau, seul le haut du dos du cormoran, prêt à plonger,
dépasse, alors que l’albatros s’enfonce juste
assez pour pouvoir palmer. Eliot, c’est plutôt un cormoran.
Dans le coin, ça vaut mieux. Nous retraversons vers le petit
rocher Maxwell. Au milieu du kelp, un phoque montre sa tête.
Plus une risée. Plus un souffle de vent. Nous prenons des
photos macros des feuilles de kelp, jaune d’or, en contre jour,
sur la mer lisse et noire. Nous rentrons au bateau, à la rame,
un coup de rame d’un côté, puis de l’autre.
Un coup chacun, toutes les trente secondes, pour profiter du moment.
De retour à bord, nos voisins, pas très pros mais très
sympas, fêtent l’anniversaire de madame. Gilbert snobe
les amateurs. Véro finit la cuisine mais envoie, comme cadeau
d’anniversaire et de bon voisinage, un pot de son excellent
chimitchuri maison (sauce aux herbes qu’on mange avec la viande,
c’est à dire avec tout ici). Dîner au chaud en
attendant le vent et nouvelle discussion très animée.
Il est question de bateaux, d’Antarctique, de Bretons, de voyages
et d’amitié.
Nous dormons à onze heures. En attendant la nouvelle dépression
de cette nuit.
YVES
Yves
Marcheur, alpiniste, pêcheur, pêcheur sous-marin,
pêcheur à la mouche.
Tranquille, chaleureux, joueur, aime bien tirer sur le bateau
pour le faire avancer.
Marin multi-cap-hornier.
Dix ans de tour du monde, pas encore arrivé à la
moitié.
Amoureux de la nature, artiste peintre et photographe macro.
Yeux clairs, cheveux longs et clairs.
Aime la baston et les manœuvres.
Parle Français, Castillan, Anglais, Brésilien,
Turc.
Expert météo.
Très cool, aime le simple qui fonctionne. |
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